Ce jour d' août , tu prenais ton dû
à la terre blonde , repue
oeil pour oeil , blé pour blé
c'était les moissons,l'été.
Est ce que ta charrue s'est arrêtée ,
quand la nouvelle est tombée?
je suppose que t' as du glaner
du regard ;ton cheval , les épis de blé
Emile, as-tu senti sous la chaleur, le long d'ton dos, sourder la peur?
j suis pas sûre que quand t'es parti
les coquelicots, tu les avais à ton fusil
bientôt t'en verras en bouquets, fleurir de leur sang, tes amis.
J'espère que t'avais connu la douceur
les caresses d'amour d'une femme
avant d'aller chemin des dames
perdre la candeur de ton âme.
Emile, quelle image tu t es fabriqué
au fond de la mort dans les fossés?
t'avais pas appris à tuer
dent pour dent, t'as du tirer
est ce que tes mains ont tremblé
quand son coeur tu l'as torpillé?
Emile, t'as baillonné tes souvenirs
pour ne plus jamais les rouvrir
mais sur la photo de famille
j vois bien ton regard qui chavire
d'un revers d'un cil.