Marie

 

 

 

 

Rodin disait qu'il ne sculptait pas l'extérieur d'une vie mais bien la profondeur du modèle. Ainsi parlait -il du squelette et de la musculature qui donnent le modelé, mais pas seulement :le plein, la densité du modèle se situe tout aussi bien dans l' âme de celui-ci. Et c'est  à mon avis, ici que se situe la frontière entre la technicité et le talent. Peu d'artistes savent rendre cet invisible présence .

Je n'ai pas la prétention de maîtriser la technique et encore moins d'être une artiste, mais mon plaisir de création réside dans l'échange intime qui a lieu entre le modèle et moi. Aujourd'hui, pour la première fois de sa vie, mon amie Marie s'est mise à nue davant mes crayons. Je sais qu'enlever son masque de tissu n'est pas si facile. Ainsi, on se retrouve face à l'autre , dans un face à face inédit. Pas de séduction charnelle, entrave du mouvement, un corps nu , étalé comme offert à l'oeil de l'autre. Il faut une sacrée dose de confiance pour tenir ce discours corporel . Mon modèle savait -elle ce matin qu'en posant pour moi, je ne verrai pas cet extérieur ?

Une fois, le corps détendu par les bavardages et la douce chaleur, tout s'est apaisé, transformé et j'ai pu voir , Marie, sous tes formes opulentes, dans cette cascade de chaire dorée, l'intérieur de ton âme. Peu importe si je n' ai pas su en fixer parfaitement le reflet sur la toile. Tu m'as donné un moment magique, un petit peu de toi, peut-être même ce que tu ne vois pas dans ton miroir. Alors , je te remercie car ce présent me touche d'une manière indicible.

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